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Etat de la Législation sur les tests ADN en France, comment et pourquoi?

Apparu en vente libre il y a une dizaine d’années, le test ADN est venu se greffer dans l’univers de la généalogie en permettant de découvrir ses origines ethniques.

Ces tests sont particulièrement populaires aux Etats-Unis, où la population est quasi-entièrement issue de l’immigration, d’Europe ou d’ailleurs, sans précision claire sur leurs pays d’origine.

Qu’est ce que vous apprend un test ADN ?

Par exemple, pour une personne née en France, un test ADN donnera les caractéristiques suivantes : « 88% France, 10% Italie, 2% autres ». Tandis qu’un généalogiste lui précisera qu’il est êtes originaire de Ria-Sirach dans les Pyrénées Orientales, qu’il a une branche non négligeable provenant de la région de Rochefort en Charente Maritimes, qu’un ancêtre de ses ancêtres vient de Novare en Italie et que sa branche alsacienne est issue d’Allemagne.

Si certains pensent que l’exactitude biologique du test génétique peut se substituer au travail d’un généalogiste, ils sont donc bien loin de la réalité car le rendu est totalement différent. A moins d’avoir un aïeul aussi célèbre que Louis XIV dont l’ADN a été étudié, il est fort à parier qu’un test génétique ne vous révèlera rien de précis sur vos ancêtres.

Néanmoins on comprend que cela puisse faire rêver les passionnés d’histoire et d’anthropologie, et j’avoue avoir été moi-même tentée d’en faire un, bien que je connaisse mes racines jusqu’aux années 1600.

Mais voilà! En France, si vous avez suivi, c’est interdit!

Le code pénal stipule précisément, dans son article 226-28-1 : « Le fait, pour une personne, de solliciter l’examen de ses caractéristiques génétiques ou de celles d’un tiers ou l’identification d’une personne par ses empreintes génétiques en dehors des conditions prévues par la loi est puni de 3 750 € d’amende. »

Il faut comprendre que ce sont bien les tests génétique ou tests ADN qui sont incriminés par la formule « examen de ses caractéristiques génétiques » et « empreintes génétiques« . Cet article se situe dans la partie « atteinte aux personnes » du code pénal, sous chapitre « atteinte à la personnalité », cela a son importance pour comprendre la disposition.

L’article 226-28 du même code prévoit des sanctions plus sévères à l’encontre des personnes pratiquant les tests pour autrui, à savoir les laboratoires ou les entreprises proposant ces tests: « Le fait de rechercher l’identification par ses empreintes génétiques d’une personne en dehors des cas prévus à l’article 16-11 du code civil est puni d’un an d’emprisonnement ou de 15 000 euros d’amende. »

Pour ceux qui ne voudraient pas naviguer dans le code civil, « l’article 16-11 » expose qu’il est possible d’avoir recours aux tests génétiques dans le cadre d’enquêtes judiciaires ou à des fins médicales.

Comment l’interdiction des tests ADN à fins récréatives s’appliquent elles?

D’aucuns vous diront qu’il suffit de passer une frontière pour réaliser ces tests en toute liberté, et qu’il suffit de se faire livrer les résultats à une adresse à l’étranger pour passer inaperçu. Pourtant cela ne rendra pas votre démarche conforme à la loi. En effet la loi bioéthique précise que cette interdiction vaut pour toute personne domiciliée en France, et s’applique aux ressortissants français au delà des limites géographiques du pays.

Pourquoi les tests génétiques sont ils interdits ?

Mais alors pourquoi de telles dispositions ? Pourquoi le test génétique à des fins récréatives ou généalogiques se retrouve au chapitre « atteinte à la personne » de notre code pénal, mais que le généalogiste peut fouiller le moindre recoin de vos racines et peut se permettre de publier ses résultats sur des sites en ligne ?

Le généalogiste fouille l’état civil, et fonde votre généalogie sur les vérités écrites dans ces registres. Il serait facile pour un test génétique de remettre en cause le travail fondé sur les registres de l’administration française en démontrant qu’une personne n’a en réalité aucune branche italienne, ou allemande, pour reprendre notre exemple. Car en France, ayez à l’esprit que la filiation trouvée dans les actes d’état civil est basée sur une présomption de paternité qui dispense de toute vérification biologique.

Une présomption juridique souveraine

En effet, la filiation en France s’établit par la loi, qui prévoit que l’enfant né ou conçu pendant le mariage a pour père le mari de la mère. C’est la loi, dans son article 312 du code civil, qui le dit, c’est comme ça, même si le mari était à la guerre pour une durée qui s’étend de 1 ans avant et après la conception supposée.

La réalité biologique serait un peu différente, et l’étude scientifique de génétique la plus aboutie (Larmuseau et al., 2019) mesure un pourcentage d’enfants non issus du mari de leur mère pouvant s’élever à 6%.

Mais en France le mariage a été institué pour régler l’organisation du patrimoine et la transmission à ses descendants . La notion même de paternité n’est pas basée sur la biologie, mais sur une culture familiale. C’est ce que Pagnol nous dit dans sa trilogie « Marius » « Fanny » et « César » : « Le père c’est celui qui aime », ce n’est pas le concepteur parti en mer avant la naissance de l’enfant.

Nous vivons dans une réalité filiale juridique où le père c’est celui qui élève, c’est celui qui va transmettre le patrimoine familial et la culture familiale, c’est celui qui construit la personnalité, si on se met à lui confronter la réalité biologique, c’est toute l’organisation familiale qui est menacée.

Le souci de la sécurité familiale

C’est donc la préservation de la sécurité de la famille qui aurait guidé le législateur dans sa décision. C’est le souci de la sécurité familiale qui fait classer la « recherche génétique à des fins récréatives et généalogiques » dans le chapitre du code pénal dédié aux « atteintes à la personnalité ».

La recherche généalogique est conforme à l’ordre établit dans les registres d’état-civil, libre à vous d’exposer le contenu de vos recherches au quatre coin d’internet bien qu’il s’agisse d’informations confidentielles. Les tests ADN par contre sont contraire à l’ordre public français.

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